Les villes commémorant les évènements de 1870 en Dunois
par Lucien ROYNEAU
Châteaudun est peu connue malgré son majestueux château, beaucoup de gens en France ne peuvent la situer sur la carte. La municipalité en est bien consciente et cherche par divers moyens à combler cette lacune, site internet, organisation de manifestations diverses, accueil d’un brocanteur médiatique qui y a créé une de ses « Maisons des brocanteurs », et pourtant peu de petites villes peuvent se prévaloir d’avoir un nombre important de rues à leur nom ( Verdun est hors concours). Le 18 octobre 1870, des francs-tireurs de Paris, de Cannes, de Nantes, de Vendôme et du Loir-et-Cher avec des dunois (gardes nationaux, pompiers et habitants) se sont opposés héroïquement à un importante armée prussienne et bavaroise et ont été battus par plus fort qu’eux. En représailles, la ville a été pillée et plus de 200 maisons ont été volontairement incendiées. L’écho de cette défense héroïque et des exactions ennemies a été largement médiatisé, photographies des ruines à l’appui, dans les journaux nationaux et internationaux et de partout des secours sont envoyés : argent, vivres, meubles, etc. Par ailleurs, bon nombre de villes ont voulu lui dédier une portion de leur voirie[1] et en 1877, elle est autorisée à faire figurer sur ses armoiries, l’insigne de la Légion d’honneur.
C’est ainsi, qu’en éliminant des rues de localités voisines qui sont avant tout directionnelles (encore que direction et commémoration peuvent coexister) on trouve des rues de Châteaudun à : Asnières, Arras, Auch, Belfort, Bordeaux, Boulogne-Billancourt, Calais, Cambrai, Chartres, Clermont-Ferrand, Cognac, Dourdan, Dreux, Issoire, Ivry-sur-Seine, La Garenne-Colombes, Le Havre, Le Mans, Lille, Montigny-en-Gohelle (Pas-de-Calais), Nantes (présence de francs-tireurs de Nantes au combat), Nogent-sur-Seine, Nouzonville (Ardennes), Paris, Pont-à-Mousson, Rennes, Saint-Denis, Saint-Raphaël, Tergnier (Aisne), Toulouse, Tourcoing, Tours, Troyes, Vichy.
Des boulevards de Châteaudun à : Amiens, Cannes (participation des francs-tireurs de Cannes au combat), Lézignan, Orléans, Montreuil-sous-Bois (rétrogradé en passage de Châteaudun).
Des places : Levallois-Perret.
En Algérie avant l’indépendance : Alger et la ville de Seigle, devenue en 1874 Châteaudun du Rhumel[2].
Les village proches, Varize et Civry, entièrement brûlés par les Ulhans le 14 octobre 1870 n’ont pas eu le même traitement, probablement occulté par le 18 octobre, et par le manque d’une couverture photographique : une rue de Varize à Châteaudun, Paris et Bordeaux (plus par le nouveau combat du 29 novembre qui a opposé des tirailleurs volontaires girondins et des francs-tireurs parisiens aux Prussiens et Bavarois), une rue de Civry à Châteaudun, Paris et Chartres.
La bataille de Coulmiers, une victoire de l’armée de la Loire le 9 novembre 1870, est assez glorifiée : Paris, Bergerac, Bordeaux, Houilles (78), Le Perreux-sur-Marne, Lille, Nogent-sur-Marne, Meung-sur-Loire, Nantes, Nogent-sur-Marne, Périgueux (rue des mobiles de Coulmiers), Toulouse, Tourcoing.
La bataille de Loigny, une défaite de la même armée le 2 décembre 1870, n’a pas sa rue dans la capitale, on trouve une rue à Orléans, Chartres, Voves et une place à Guingamp (participation des volontaires de l’ouest et des zouaves pontificaux).
Châteaudun a une rue de Civry, une rue de Loigny, un passage des francs-tireurs de Cannes (depuis le 27 juin 2021) et une rue de Belfort, nommée ainsi en juillet 1884, par politesse envers Belfort et sa longue résistance en 1870-71. Les dunois venaient d’apprendre que cette ville allait attribuer à l’une de ses rues le nom de Châteaudun[3]. 1884, c’est une reconnaissance tardive, de nombreuses villes s’étaient empressées d’honorer Châteaudun bien avant. On peut être étonné qu’on ne trouve pas à Châteaudun une rue de Saint-Quentin, ville qui résista aux prussiens (peut être pressés d’aller sur Paris) le 8 octobre 1870. Ils la prirent le 19 janvier 1871 au cours de la bataille dite de Saint-Quentin. Cette action héroïque, 10 jours avant Châteaudun, eût aussi un retentissement national et de plus, en novembre 1871, les défenseurs de Saint-Quentin offrirent à la ville de Châteaudun un drapeau qui a été déposé au musée. On peut y lire à l’avers : « Les défenseurs de St-Quentin, 8 octobre 1870 » et au revers « aux défenseurs de Châteaudun le 18 Octobre 1870 ». On ne sait pas pour quelle raison, Châteaudun n’a pas fait la réciproque et c’est peut être pour cela qu’après la seconde guerre mondiale, la rue de Châteaudun à Saint-Quentin est devenue la rue du Colonel Fabien. Cette ville fut aussi décorée de la Légion d’honneur en 1897.
[1] Les recherches ont été faites avec l’aide de Google Maps et il peut y avoir des oublis.
[2] Châteaudun-du-Rhumel, Une fondation coloniale en pays constantinois, 1874-1963, Bulletin de la Société Dunoise, n°311, 2021.
[3] Rolland Monique, Châteaudun capitale du Dunois, rue de Belfort, p. 124. Édition ville de Châteaudun.
Photo de couverture : ©Musée des beaux-arts et d’histoire naturelle de Châteaudun
Il y a une rue Châteaudun également a Lodéve Hérault
Bravo pour ce travail,
Une petite remarque concernant Cannes, mes recherches sur le site Delcampe des cartes postales anciennes me font souvent croiser la ville de Châteaudun à Cannes :
les cartes du début du siècle font toutes état de la « place de Châteaudun », effectivement en souvenir des Francs-tireurs de Cannes morts en 1870 à Châteaudun, en regardant aujourd’hui sur le site de la ville de Cannes on trouve « le passage de Châteaudun » rénové, pas de boulevard.