Deux cartes de Simon Tiercelin,
Cartier à Orléans

Dans le bulletin de la Société Dunoise de 2013, nous avions présenté les billets de bienfaisance écrits au dos de cartes à jouer1 par le curé Raveau de Romilly-sur-Aigre2. De 1781 à 1792, il a ordonné à des bouchers ou meuniers locaux de donner une certaine quantité de viande ou de pain à des pauvres, aux frais de l’Hôtel-Dieu de la Ferté-Villeneuil.

Instructions du curé Raveau au dos d’une carte à jouer

RACHEL dame de carreau – En partie basse : à l’endroit tampon du cartier

La fabrication était simple et très encadrée par les autorités. Pour les figures, il y avait des moules en bois3 gravés de vingt figures inversées sur lesquels le papier était imprimé, puis les cartiers se servaient de pochoirs pour poser les couleurs.

Pour les valeurs, d’autres pochoirs étaient utilisés. Ce papier imprimé était collé sur du carton blanc et la planche était découpée. Ces cartes de jeu devenues très populaires dans toutes les classes sociales, le pouvoir y vit vite une possible source de revenu.

Ce sont des cartes usées qui proviennent de trois jeux, nous avons en particulier 3 as de cœur, 3 sept de cœur, 3 huit de pique et seulement 5 figures dont 2 valets de carreau. Le dos blanc des cartes se salissant vite, pour éviter toute tricherie4 le jeu était rapidement changé pour un neuf et ce dos de jeu réformé était utilisé pour écrire diverses recommandations.

PALLAS dame de pique  – En partie basse : à l’envers tampon du cartier

Fleur de lys en filigrane

Cependant, il pouvait mettre à discrétion, son nom sur d’autres figures. C’est pourquoi nous avons deux cartes, une dame de carreau et une dame de pique qui portent en partie basse, le tampon du cartier « S.TIERCELIN » à l’endroit pour la première, à l’envers pour la deuxième.

La régie des tailles imposait l’utilisation d’un papier filigrané d’une fleur de lys et veillait à ce que l’un de ses représentants assiste au tirage des planches ainsi qu’à leur numérotation. Même si ell e n’a pas été toujours appliquée, la taxe sur les cartes a été ressuscitée chaque fois que le pouvoir en place a eu besoin d’argent. Elle ne disparaîtra qu’en 1959.

C’est Henri III qui instaura la première taxe sur les cartes en imposant les cartiers.

Sous l’ancien régime, la France était partagée en neuf régions de fabrication avec, chacune, une caractéristique particulière des figures. Le Mans, Orléans, Chartres5, Laval et bien d’autres villes relevaient du portrait de Paris et les figures produites sont identiques. La seule différence est l’identification obligatoire du cartier qui devait indiquer, pour chaque jeu, son nom sur le bluteau6 du valet de trèfle avec, au dessous, la ville ou il exerçait.

Moule en bois d’un jeu gravé de vingt figures inversées au portrait de Paris pour le cartier Huchard – Source Gallica Bnf

A partir de 1772, Simon Tiercelin exerce le métier de cartier, rue Sainte-Catherine à Orléans.

De 1783 à 1788, il est déclaré cartier et épicier7.

Sa généalogie n’est pas connue.

Ces cartes sont maintenant aux archives départementales d’Eure-et-Loir.

Royneau L., Quand le curé de Romilly-sur-Aigre distribuait les cartes !

Bulletin de la Société Dunoise, Archéologie, Histoire, Sciences et Arts, n°303, 2013, p. 144.

Cf. Gallica-BNF, Jouer aux cartes, le passe-temps

Moule d’un jeu gravé au portrait de Paris pour le Cartier Huchard.

Bouton Étienne, Les cartes à jouer, Le Maine sur tapis vert, Revue MAINE Découvertes, n°65, 2010, p.15.

Jusselin Maurice, 1957, Imagiers et cartiers à Chartres, Paris, Bibliothèque Elzévirienne, Études et Documents. Par ailleurs, un édit de 1751, réduisit à 63 le nombre de villes où les cartiers pouvaient exercer, d’où l’origine orléanaise de ces cartes, la profession de cartier ayant donc été interdite à Chartres et à Laval.

Bluteau, récipient dans lequel le cartier délaye ses couleurs, emblème de la profession.

Garsonnin Maurice, Cartiers, Mémoires de la Société d’Agriculture Sciences Belles-Lettres et Arts d’Orléans, 5ème série, tome 14, 1914, janvier-février, p. 98.

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